Vie culturelle et artistique

Le théâtre municipal
(CPA CIM Coll. Ch. Attard)

La construction d'un théâtre, à l'initiative de MM Jérôme Fidelle (premier contrôleur civil de Sfax), Sadok ben Mohammed Djellouli (caïd-gouverneur), Jules Gau (vice-président de la Municipalité), Georges Porcher (ingénieur principal), et sous la responsabilité de M. Guy, architecte, fut entreprise au tout début du XX e siècle.

Construit avenue Jules-Gau (antérieurement avenue de Paris), en plein centre ville, et conçu suivant les données classiques du XIX e siècle, ce bâtiment de style hispano-mauresque, dont la salle en demi-cercle pouvait accueillir 500 personnes, fut inauguré le 22 janvier 1903 en présence des hautes autorités du pays. 

La troupe composée par M. A. Manrick qui devait assurer le spectacle, était sur place depuis le 18 janvier 1903 car l’inauguration était prévue pour le 20. Mais, par suite de différentes circonstances indépendantes de la Direction et de la bonne volonté des entrepreneurs et conducteurs des travaux, cette inauguration n’eut lieu que le jeudi 22 janvier. La Dépêche sfaxienne du samedi 24 janvier 1903 en donna un compte rendu complet. Le chroniqueur y regrette qu’on n’ait pas eu une cérémonie populaire plutôt qu’une séance réservée au tout Sfax élégant garnissant le théâtre du rez-de-chaussée au balcon. Il signale que l’honorable M. Guy, l’architecte du monument, avait demandé au nouveau directeur que l’entrée soit permise à tous les ouvriers qui avaient coopéré à son œuvre, et que, de bonne grâce, M. Manick avait accepté de leur réserver les deuxièmes galeries qui ne devaient être livrées au public que l’année suivante. Ils étaient venus plus de 250 saluer le nouveau directeur et faire à leur architecte une chaleureuse ovation au troisième entracte, le forçant ainsi à apparaître dans la loge municipale où il reçut les applaudissements de toute la salle.

Dans la Dépêche sfaxienne du 25 janvier 1903, outre le prix des places ainsi que les réductions de prix auxquelles pouvaient prétendre certaines catégories de personnels, était donné le programme des spectacles donnés du 22 janvier au 3 mars 1903. Ce dernier comportait les représentations suivantes : Faust, Mireille, Le Grand Mogol, Les Mousquetaires de la Reine, La Traviata, Lucie de Lammermoor, Les 28 jours de la Clairette, Le Songe d’une nuit d’été, La Princesse des Canaries, Carmen, Le Chalet, La Périchole, Haydee ou le secret, La favorite, Les Saltimbanques, Mignon, Lakmé, Fleur de thé, La fille du régiment, La Vivandière, Rigoletto et la Petite Mariée.



Ce théâtre fut le centre de la vie culturelle sfaxienne pendant presque quatre décennies.
Nombre de troupes en tournées y donnèrent leur spectacle : 

la Comédie Française qui venait chaque année y jouer une pièce du répertoire classique,
les galas Karsenty pour le théâtre dit de boulevard, 
le " Théâtre du petit monde ", théâtre créé par M. Pierre Humble  pour et par les enfants, 
la manécanterie des petits chanteurs de Paris, 
l’excellente troupe tunisoise de théâtre amateur de l’Essor, 
la troupe juive de Sousse dirigée par N. Nadjar (elle joua le 4 juin 1922 "Moïse et le Pharaon" en langue arabe), 
la troupe de Souleymane Kardahi venue d’Égypte qui donna des représentation en janvier 1909. 
et des troupes italiennes y donnèrent des opéras fastueux.

l'Harmonie sfaxienne en 1925. 
Directeur M. Octave Chapotot de 1918 à 1936. 
(Document J.B. Fourtanier)
M. Chapotot fut professeur de musique et de dessin à l'école primaire des garçons.

Mais cette scène fut utilisée par des sociétés artistiques locales. Il semble bien que la plus ancienne fut la Philarmonique sfaxienne, qui en 1889 à l’initiative de M. Escano, réunit un petit groupe de musiciens amateurs. Elle se transforma en association et prit le nom  d'Harmonie sfaxienne , fanfare musicale autorisée le 27 août 1899, et qui se couvrit de lauriers en mars 1932 lors du grand concours de musique à Tunis. Il lui fut associé une école de musique en 1910. 

L'école de musique en 1936
(Document J.B. Fourtanier)

L'Adelphie artistique et littéraire,  autorisée le 16 février 1906, disposait d'une salle place Carnot et avait un orchestre de musique classique. Elle donna le 28 avril 1907 une grande matinée artistique et théâtrale. L'Alliance française ayant donné une représentation au cours de cette même année 1907, ces deux sociétés semblent donc se suivre dans l'ordre chronologique.
 
En 1911, fut créé le
groupe juif "Ouabi Sion" qui, dissous quelques années après, renaquit en 1935. Il disposait de sections théâtrale et instrumentale. Il joua entre autres "Joseph vendu par ses frères" (pièce en hébreu) en mars 1936.