La communauté italienne



La plupart des Italiens qui s’installèrent en Tunisie, venaient de Sicile où ils ne pouvaient pas nourrir leurs familles nombreuses. 
Les vagues migratoires les plus fortes correspondirent à des conjonctures politiques favorables telle que, par exemple entre 1855 et 1857 celle découlant du " Pacte fondamental " et des réformes d’Ahmed Bey.





Femmes et enfants siciliens en Tunisie en avril 1900
Photo M. Reymond, extraite de "Voyage d'études en Tunisie" de R. Rey. Ed. Delagrave. 1900
(Coll. Ch. Attard)




A Sfax, le nombre des ressortissants italiens augmenta après 1870, date à laquelle il représentaient 15% des Européens, mais avec un faible capital culturel puisque l’on y comptait 60% d’illettrés. 
Cette population était majoritairement composée d’une masse d’hommes ayant fui la misère à Tripoli, à Naples ou en Sicile. Cependant on y trouvait aussi une élite sociale fortunée et politisée, avec quelques familles (Avvocato entre autres) ayant souvent une charge consulaire ou des activités économiques prospères, qui tentait d’encadrer l’ensemble de ces ressortissants Italiens.


L’abrogation des décrets beylicaux de 1874/1879 ouvrant la pêche au filet aux pêcheurs autres que kerkenniens et sfaxiens, permit aux Italiens de s’installer à Sfax pour s’y adonner à tous les types de pêche. A partir de ce moment la migration des Italiens fut souvent définitive, l’élément féminin ayant suivi.




Pêcheurs siciliens

Pêcheurs siciliens de Sfax en 1903
(Cliché A. Allemand)





De 300 âmes en 1881, la population italienne atteignit 4 000 personnes pendant les années où les grands chantiers d’équipement de la ville, à la fin du XIXe siècle, virent arriver des cohortes de manœuvres (terrassiers, tailleurs de pierres, maçons…) pour participer à la construction du port et de la voie ferrée de Sfax à Gafsa. Il y eut ensuite des migrations internes en Tunisie et, en 1903, quand commença la construction de l’hôtel de ville, ils n’étaient plus que 2 500.



Leurs qualités de travail et leur sobriété faisaient qu’ils étaient très appréciés de leurs employeurs, même s’ils étaient âpres au gain et parfois vaniteux du fait que les conventions de 1896 les mettaient théoriquement sur un pied d’égalité avec les Tunisiens et les Français. 
Ces conventions furent conclues à l’expiration des 28 années d’application du traité signé entre l’Italie et le bey le 8 septembre 1868. 





Mme NERINI et ses six enfants en 1925.
(Document Mme Marcelle Nérini)




Néanmoins les pêcheurs (pour la pêche aux éponges ils utilisaient des foënes ou des tridents, et les vendaient à l’état brut), artisans et ouvriers avaient souvent des conditions de vie inférieures à celles des Tunisiens, et vivaient dans des quartiers (vieux quartier Franc, Picville) où les conditions de salubrité laissaient alors à désirer.
Cette population atteignit le nombre de 3 500 en 1911. Ceux qui optèrent pour la nationalité française, suite au décret du 8 novembre 1921, le firent surtout par opportunité car on leur faisait miroiter une amélioration des conditions sociales.
Dans l’ensemble, cette communauté fut peu touchée par l’assimilation française, mais elle n’augmenta que faiblement (2 610 Italiens à Sfax en 1936).




siciliens pechant


Sicilien pêchant les éponges au trident (kamaki) et à l'aide du saut-miroir.
(Cliché A. Allemand)





Avec l’arrivée au pouvoir de Mussolini en Italie, la rivalité franco-italienne qui en résulta (la plupart des notables italiens de Tunisie étaient partisans de l’idéologie fasciste), provoqua une marginalisation professionnelle de toute la population italienne de Tunisie, donc de Sfax (des naturalisés comme des autres). 
La fin du deuxième conflit mondial marqua la fin de l’application de leur statut particulier hérité des
conventions de 1896.
L’école italienne fut fermée, et on assista à une chute drastique du nombre des ressortissants italiens.

Certains, ayant collaboré avec les troupes de l’Axe pendant l’occupation de la Tunisie par ces dernières en 1942/1943, furent expulsés en Italie. 
Ceux qui restèrent furent très nombreux à se faire naturaliser, beaucoup choisissant d’ailleurs la France comme pays d’accueil après l’indépendance de la Tunisie.






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